L’arrivée au monastère de Gion


Ca y est, m’y voici.
J’ai troqué mes habits de ville pour un simple kimono d’étoffe et un hakama de trame grossière. J’ai laissé mes chaussures à l’entrée et sorti mes savates de paille.

Je serai bien ici. Je le sens. Hannya me regarde de son regard triste et égaré. Et je me rends compte qu’elle est ce démon, ce démon du nô qui m’a amené jusqu’ici.
Comme Fujiwaka avant moi, je dois aussi faire le deuil et mesurer le chemin qu’il me reste à parcourir au côté de ma voie. Seul.

Je serai bien ici. Avec mon thé vert fumant, mon sabre millénaire et mon éventail de nô. Avec Atsumori et les poèmes qui ont bercé son enfance. Avec le temps qui m’autorise à m’échapper plus loin, ailleurs.

Je regarde mon espace de transformation… ce n’est pas un espace d’auteur, non, mais un espace de comédien. Il suffirait de remplacer l’ordinateur par un miroir et les stylos par des crayons et autres ustensiles de maquillage. Je regarde mon espace de transformation… ici, dans cette pièce, rien, ni personne ne peut me ramener de votre côté du monde. Ici, dans ce temple du 14eme siècle où je fais ma retraite, rien ni personne ne peut m’arracher au silence qui transforme les espaces et le temps.

Nous nous devons cette rigueur. Tous ! La rigueur de se donner les moyens d’y être et d’y vivre le présent… C’est ce que j’ai appris là-bas, au Théâtre du Soleil et qui ne cesse de m’accompagner, même quand je suis perdu, même quand je ne sais plus.

Demain matin débutera cette aventure. Et je suis prêt. Prêt à recevoir cet homme immense et à l’accompagner aussi loin qu’il le voudra. Aussi loin !

Chut ! J’entends les cloches qui résonnent et les prières qui grondent.

A demain, peut-être !

Motokiyo

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