Journal d’un fœtus – jour 6

À la fin de cette première semaine où, courageusement, ma mère et moi, avons fait le tour des administrations pour lever le secret sur ta naissance et, pour ma part, pour essayer d’être mis en contact avec toi, on me dit qu’il faudrait une lettre. Que je dois prendre ma plume pour mettre dans une enveloppe sous scellé, à ton nom, la lettre que je voudrais que tu puisses lire, si un jour, toi où tes parents, décident de faire les démarches pour accéder à tes origines.

 

Sacré challenge que je prends, comme à mon habitude, comme un signe de l’Energie pour m’aider à recontacter et à nettoyer ces scories qui n’ont plus d’utilité dans ma vie aujourd’hui. Il faut savoir se défaire de ce qui nous a fondé pour nous fonder à nouveau. Et ainsi tous les jours, tous les instants. Et ainsi pour tous. Car tous nous sommes liés. Et chaque blessure soignée libère un peu la mane humaine dans son ensemble, la planète, même ! Mais je m’égare. Encore une fois pris en flag de vouloir sauver le monde pour ne pas affronter la petite écharde qui pointe là !

 

Le plus difficile, ici, c’est que dans ma folie, j’ai décidé de tenir ce journal en ligne et que, chaque jour passant, je dois révéler des choses qui peuvent être très intimes, qui impliquent d’autres êtres. Et à chaque parution, je m’inquiète de comment ma mère va prendre telle chose, et sa sœur, etc… Et là, il me faut écrire une lettre à ma sœur, une vraie ! Pas un poème que j’afficherai sur mon mur en attendant des louanges qui ne calment rien, une vraie lettre. Scellée. Qui, même si elle sera lue mille fois ici, attendra dans le noir, le feu de ses yeux. Peut-être indéfiniment.

 

Mais que lui dire ? Et comment un enfant trisomique de quarante trois ans peut recevoir ces mots… Faut-il que j’écrive comme à un enfant ? Ou alors comme à moi-même ? Ou alors pas…

 

Qu’est-ce que je vais lui dire… Si j’ai imaginé cet instant tant et tant de fois, jamais je n’ai pensé qu’il arriverait réellement. Je suis un écrivain. J’ai plein d’histoires et de mots qui chantent et rient là, dans la tête, mais, en vrai. En face de toi. De toi qui n’a pas de filtre… Que reste-t-il ?

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