wow… wow… wow… J’ai pas mal pensé à ton texte du jour et comme je ne suis pas expansive en public, je t’envoie ce message en privé parce que ce texte ne peut pas se contenter d’un « j’aime ». D’autant que je n’ai pas tout aimé !
J’ai lu ta colère et je l’ai comprise et je suis même d’accord avec ton constat. Tout est en mouvement en ce moment et tout le monde est un peu perdu, certains plus que d’autres qui partent vers l’excès, l’extrême, l’inconsistance, surement pour se protéger d’une trop grande souffrance. C’est lâche mais c’est comme ça et c’est toute leur vie qui est comme ça pas que leurs relations amoureuses. Sans compter les défonces qui y sont pour beaucoup dans les comportements. Mais en revanche, je pense qu’il y a certaines notions de l’amour qui font partie d’un ancien monde et qu’il faut s’en défaire si l’on veut avancer sans pour autant perdre en substance et en profondeur. Au delà de la fidélité et de la notion de couple avec ses droits et ses devoirs, il y a l’amour. Sans amour, il n’y a rien de durable, que l’on reste ensemble ou que l’on se sépare, que l’on ait des enfants ou qu’on en ait pas.
L’amour peut se transformer avec le temps, comme tout le reste, il suffit juste qu’on ait choisi de continuer d’aimer. À un moment clé d’une vie, partir peut permettre de continuer d’aimer, d’une autre manière. Et c’est finalement ça qui est le plus important, continuer d’aimer sinon l’amour meurt. Continuer d’aimer même si l’on ne vit plus ensemble, continuer à faire vivre « la famille sacrée » même si elle est séparée physiquement. C’est un choix de vie qui dépasse la notion de fidélité et qui est au dessus de lois qu’il faudrait respecter d’après ce que tu écris à la fin de ton texte.
Il y a quelques temps j’ai lu un livre sublime de raoul vaneigem « de l’amour ». Je te le conseille. Et ton texte m’a fait penser à une de ses phrases que j’ai toujours à portée des yeux
« Je ne me fais pas à l’idée qu’une force aussi irrésistible se délite, s’émiette, s’éparpille au vent terrible de l’indifférence. Sans doute ai-je trop souvent chaussé les gros sabots qui le piétinent. Quoiqu’il en soit, je n’ajouterais pas mes regrets au mur des lamentations dont le commun entoure le cimetière de ses amours défuntes. Il n’y a pas d’amours mortes, il n’y a que des coeurs résignés à n’en pas raviver la flamme. L’amour crée et se recrée, telle la vie. L’appréhension de la mort ne récolte que les cendres qu’elle a semées. »
voilà, et là j’arrête parce que ça va être trop long et qu’il serait plus intéressant d’en discuter de vive voix !
je t’embrasse et te souhaite le moins de « colères » possibles !
Et encore merci pour tes réflexions partagées.
Kriss M
Réponse :
Je suis tout à fait d’accord avec toi. Enfin presque… 😉
Il faut s’entendre sur ce que l’amour représente. Pour moi, l’ancien paradigme porte quelque chose de plus profond que le nouveau (même si son sens premier s’est perdu rapidement et qu’en en faisant une règle absolue, on l’a perverti au point de le rendre mortifère). Parce que l’amour, je parle ici d’amour courtois, de celui qu’on réserve à un être en particulier (ou à quelques, suivant nos coutumes et nos croyances ;)) n’est pas quelque chose qui nous tombe dessus. Quelque chose d’extérieur à nous. Je ne le crois pas. C’est juste une route possible vers l’amour de soi, le seul qui puisse nous rendre réellement amoureux. L’autre ne porte jamais de solution miracle, il n’a pas de pouvoir sinon celui qu’on lui octroie. Le couple, le partenariat qu’on établit devrait retrouver cette dimension responsable. Hors notre littérature, nos fictions théâtrales et filmées, nos légendes sont pleines de romances et de passions. Ce qui ouvre la porte à tous ceux qui n’ont pas le courage et la rigueur de mesurer ce qu’ils s’apprêtent à mettre en route. Quand cela ne concerne que deux personnes, je suis d’accord qu’il faut pouvoir faire ses expériences et que des histoires même complètement tordues ont leur raison d’être. Au pire, on s’enfonce un peu plus dans la bêtise. Au mieux, on avance sur le chemin de la compréhension de qui nous sommes et de ce que nous valons à nous-même. Idem quand la violence physique ou morale est au rendez-vous.
Mais quand il s’agit d’un foyer, avec des enfants qu’on a reconnu et qu’on accepte donc d’emmener à leur émancipation, la donne change. Et c’est une chance.
Personne n’aurait l’idée de ramener son enfant à l’Etat quelques années après en justifiant cet acte d’un : « je ne l’aime plus ! » et pourtant, l’enfant, on ne l’a pas choisi. Je parle ici de sa personnalité, de l’être qu’il devient. On est capable, en tant que parent, d’apprendre à l’aimer tel qu’il est !
C’est drôle tout de même. On en est capable à cet endroit et pas avec notre compagne ou notre compagnon, quelqu’un qu’on a choisi et assez aimé pour penser qu’on passerait sa vie avec lui ou elle ?!
C’est bien que l’amour n’est pas ce que l’on voudrait nous faire croire qu’il est. L’amour est à l’intérieur de soi et il ne tient qu’à nous de l’amplifier, de le sublimer, de le rendre nouveau chaque jour. Certes, c’est un travail, un réel travail, mais, pour ceux qui choisissent ce type de partenariat : la vie à deux, c’est un des plus capable de nous montrer combien l’amour est avant tout une histoire de soi à soi. Et ce n’est qu’ainsi que l’on peut espérer aimer les autres. Tous les autres. Comme soi-même. Sinon, on reste le jouet d’un roman écrit par d’autres, souvent ignares eux même de ce que l’amour peut être. Le problème étant que ceux qui le rencontrent réellement n’ont pas toutes ces fables délirantes à déverser sur le sujet et qu’au final, on ne les entend que si on choisit soi même de sortir un peu de cette danse débilitante qui nous coupe de nous même et de notre responsabilité d’être.
Bien sur, c’est facile de se poser en donneur de leçon. C’est vrai que tous n’ont pas la chance d’avoir un bassin de vie qui leur laisse petit à petit mettre au monde l’être singulier et unique que nous portons tous. Mais, du coup, n’avons-nous pas le devoir de faire partager ce temps et cet espace à ceux qui ont du mal à y accéder. Surtout, en tant qu’artiste, comme je sais que tu l’es ? Ne sont ce pas nos fables qui dessineront les rêves de ceux qui viendront après ? Si celles de nos ancêtres sont capables de nous faire croire que l’amour nous tombe dessus, mais que par contre, tous nous aimons nos enfants « comme la prunelle de nos yeux ». Mdr ;))
Merci encore de ton message et de ce superbe extrait de « De L’Amour ». Promis, si prochainement j’ouvre un livre, ce sera celui là.
Bisous.
Alexandre