« Kogarashi » |
Ne pas arriver à garder l’esprit large! Être piégé par ces riens qui occupent. Préférer l’illusion au réel et ne pas savoir y prendre place. Pourquoi ? De quoi ai-je peur ? Que fuis-je ? Qui y a-t-il de mieux que de laisser le vert de la terre, le vert des arbres entrer là ?
Assumer le vide sans fin d’une vie simple et belle qui s’échappe à l’instant. Prendre au corps ces instants avec ceux que l’on aime. Et laisser faire. Laisser se faire. Tout. Indifféremment !
Dans quelque accès de lucidité, je perçois les causes de la fuite. « Avec autre chose, je serai celui que je veux être et que je n’arrive pas à devenir. » Il y a quelque chose de cet ordre là. Celui qu’on fuit, c’est soi ! Juste lui. Simplement parce qu’on a jamais appris cela. Se vivre vraiment, juste ça. Pas courir vers un but, non. Pas plus tard quand on sera grand. Pas après quand on aura réussi, non. Pas ailleurs, pas autrement. Juste là, maintenant. Juste là, dedans. Avez-vous déjà entendu le cri de chaque cellule de votre corps ? Avez-vous déjà fêté la naissance d’un contact de vous à vous, vous rendant compte que chaque fibre vous lie à la suivante et qu’avec un peu d’exercice, on découvre qu’on peut entendre tout et qu’on est lié à tout ?
Hier, me lavant les dents, j’ai senti mes pieds réagir ! Et par delà mes pieds, c’est le monde qui reçoit ce geste. Qui y a-t-il de plus merveilleux ? Et pourtant, ce matin, je me sens encore vide. Et chaque instant de même. Toujours quelque chose qui court au delà. Toujours une pensée qui ne m’appartient pas et qui dit : « c’est là-bas! » Et à chaque instant, il me faut faire le travail de revenir au rien, à la petitesse, à l’ennui, à l’inintérêt de cette petite créature que j’ai passé ma vie à ignorer. Seule chance de ne pas finir complètement dingue ! Seul espoir de faire taire la douleur. Seule indéniable rencontre possible. Ultime chance que nous avons peut-être mis mille vies à rendre accessible ! Ça ! Ce rien si simple, si évident !