Être père (suite)… Devenir bodhisattva

Aujourd’hui je suis rentré dans ma maison. Après un mois et demi de voyage.

L’éveil que j’ai connu, cette nuit-là, dans mon hamac, alors que je comprenais que personne ne pouvait tromper personne, m’a mené sur une route où l’humanité entière et tous ses mots devenaient peu à peu invisibles, absents. Où le départ, nu, vers le néant semblait la seule route vraie.

Pourtant un petit être, attaché à ma chair, m’a permis de ne pas perdre le rôle d’être homme. Ma mission, ici bas, n’est pas encore finie. Elle, avec ses yeux plein de larmes et son menton fier, me l’a rappelé. « Si tu pars, papa, alors emmène-moi ! Je veux mourir comme tu décides de le faire. Maintenant ! »

Bien sûr, cela n’enlève rien à ce que j’ai écrit ici pendant deux mois. Comme la mort, là où je suis, n’est rien d’autre qu’une porte vers un autre chapelet de corps et d’âmes. Et quand Rose m’a demandé de mourir, je n’ai pas hurlé, tant je comprenais qu’elle avait compris le peu d’importance que revêt nos vies humaines, nos lieux, nos égos.

Mais je suis ici et nous ne sommes pas deux. Mais quelques milliards. Mourir ensemble aux yeux du monde n’aurait pas été possible. Pas maintenant. Trop peu sont capables d’entendre ce qu’ils perçoivent sous le voile de l’éducation et de la peur.

Alors, j’ai réintégré mon habit d’homme, j’ai réintégré mon habit de père et je suis parti au combat. Comprenant que ma mission dorénavant serait d’être une passerelle entre les différents « je » et « Nous », un bodhisattva, prêt à finir sur la croix puisque les mots vrais font trop peur, mettent en colère. Vraiment. Puisqu’ils sont ceux qui touchent le plus profondément.

Pas pour Rose, non ! Rose a vécu l’éveil à mes côtés. Elle est la seule à avoir compris ma lettre. Elle est la seule à pouvoir rester aux côtés de sa mère dévorée par la folie et à ne pas souffrir. Parce qu’elle sait que tout ça n’existe pas. Elle sait. Elle a l’âge où ce savoir n’est pas encore complètement perdu. Les enfants sont les maîtres. Plus ils sont petits, plus ils le sont. C’est ainsi. L’âme, le cœur n’ont jamais eu besoin d’apprentissage, de règles. Au contraire. Comme la peinture sur un mur. Au début, le mur était mur. Ce n’est pas la peinture qui l’a rendu ainsi. Elle n’est qu’un masque !

Aujourd’hui je suis rentré dans ma maison. Je suis là. Et je dois faire avec les peurs qui se présentent plus souvent. Et je dois faire avec les mots. Et je dois faire avec l’argent. Et je dois faire avec les autres.

Certains me regardent avec de gros yeux. « Qui est-il cet homme qui dit tout. Sans aucune mesure ? » « Pour qui se prend-il ? » « Regardez ce manipulateur ! Il dit une chose et son contraire. Il est fou »

Que m’importe . Aujourd’hui, je sais que ceux qui ont besoin de moi me trouveront et les autres, les autres dans leur colère, dans leur peur, leur frustration, entameront le chemin. Inconsciemment. Puis quand ils seront prêts, ils accueilleront un autre maître. Que m’importe. Je sais aujourd’hui que tous m’aiment. Tous aiment tous.

Que m’importe ! Toutes les réalités coexistent ! Le bien et le mal sont la même chose. Que m’importe, tant que je reste au présent. Ouvert à tous les appels qui déferlent à chaque instant. Les limites n’existent pas. La propriété n’existe pas. Tous les maux sont les nôtres. Toutes les phrases que vous entendez dans la rue vous sont adressées. Alors tournez-vous, osez ! Osez intervenir, osez parler, osez vivre ! Vous verrez comme c’est bon.

Cinq lois à appliquer à la lettre sans aucune justification. Mais le plus strictement possible :

– Ne pas tuer (même une puce)

– Ne pas voler (même un divx!!!!)

– Ne pas mentir (dire tout tout tout ce qui vous passe par la tête. Essayez c’est très drôle et vraiment c’est le début de l’aventure !)

– Ne pas tromper sa femme ou son homme

– Honorer sa femme ou son homme à chaque instant

– Chaque mot proféré prend vie ! Donc ne pas médire, ne pas se plaindre en utilisant les mots : enfer, fatigue, etc…

Au début, on trébuche, mais dès qu’on commence à y arriver, on se rend compte que le chemin devient chaque jour plus facile.

La méditation aide beaucoup sur ce chemin. Comme se laver les dents chaque jour, méditer assis, les yeux clos et cesser d’être là, d’attendre des résultats. Juste respirer. Cela permet de laver l’écran de la peur qui nous joue des films toute la journée dans la tête. Prenez cela comme le fait de faire votre toilette. C’est capital au début pour commencer à appliquer les règles édictées par Bouddha.

Je vous aime, tous !

2 réflexions sur « Être père (suite)… Devenir bodhisattva »

  1. diverses remarques sur ton dernier texte

    il n'y a pas de vrai route… Ça serait quoi une vraie route?

    La mort est peut-être une porte,
    sûre elle est un point final à la vie singulière d'un être humain.

    La vie humaine est peut-être rien, vu d'ailleurs mais elle est vue d'ici comme une constellation unique… Elle est une trajectoire d'un système complexe engendré, entre naissance et mort, parsemée d'évènements d'être, de transmissions de créations, de points d'arrêts, de relances… petite constellation singulière qui fait advenir des éléments existentiels pour soi et les autres. Et même si c'est comme une étoile filante dans le temps de l'univers, pour nous humbles humains c'est intégré à notre univers existentiel comme des perles uniques qui participent de nos trajectoires vivantes.

    Le "prêt à finir sur la croix", me hérisse… métonymie christique, moment humain historique d'un renfermement du temps..; vous attendiez celui laisse l'attente ouverte : avec moi, sur la croix, c'est fini…Je suis le sauveur…. tentative d'écraser le symbole du "tant qu'il y a de la vie, il y a de l'ouverture", de la trouvaille, du temps, des problèmes qui vont avec mais qu'il faut surmonter de façon vivante pour soi et les autres.

    Le bien et le mal existent , mais pas comme substance mais comme évènements avec lesquels nous devons dialoguer. Ce n'est pas la même chose… une bonne parole est une bénédiction… une malédiction est une parole mal dite. Cela va faire évènement qui fait mal.

    Lesquelles de limites n'existent pas…?
    un bord de route, suivie d'une profonde rigole, suivi d'un champs ou d'une forêt sont des entre-deux, des limites… l'horizon est une limite entre le ciel et la Terre ou la Mer perçue par quelqu'un qui porte son regard au loin. Même si cette démarcation est un effet c'est un code partagé par les humains qui aiment à regarder là où le ciel disparaît caché par le paysage terrestre.

    Dans tes 5 lois… il en manque 5 🙂

    chaque loi est aussi valable pour le sujet qui les prend en compte… donc te ne te tueras pas, tu ne te voleras pas, tu tenteras de ne pas te mentir à toi même,

    si chaque mot proféré prend vie, en tout cas affecte ceux qui le reçoivent et ceux qui l'entendent, alors à mon avis il faut aussi un peu de tolérance pour soi et pour les autres. Ton envie d'imposer est peut-être une trouvaille momentanée pour surmonter et échapper à des points douloureux.. Si tu veux transmettre des forces existentielles, vivantes pour t'aider à dépasser tes peurs, ce ne devrait pas être en même temps obligés les autres à faire immédiatement le même chemin.

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