Départ pour Kyôto le 10 juillet… enfin : apprendre quelques bases du Nô

Et oui, le départ est fixé, les billets trouvés et l’aventure qui s’apprête à voir le jour sera une importante. Depuis 1994, date où j’ai découvert le Nô avec le Iemoto (maître) Kanze à la Villette en compagnie d’Erhard Stiefel, je n’ai eu de cesse de lire, étudier, chercher, mettre en jeu tout ce que je pouvais sur ce sujet.

L’année dernière, pour la première fois, j’ai pu aller au Japon grâce à la Maison du Japon en Méditerranée, ce qui a déclenché une petite cascade d’événements, dont l’un des plus importants : ce rendez-vous du mois de juillet avec Maître Udaka (représentant de la branche Kongo). Au programme : Shimai (danse à l’éventail), chant, cours de flûte, facture de masque, accompagnement lors des spectacles (en coulisses… si, si.) Et puis, visite de Kyôto sur les traces de Zeami et de Kanami pour avancer à la rédaction des « Démons du Nô ». Pour couronner le tout, nous rejoindrons, le 10 août, Maître Nomura Mansaku (Trésor Vivant), maître de Kyôgen, pour un stage de 10 jours à Tôkyô.

Bien sûr, cela n’est pas gratuit et j’ai de grandes difficultés à réunir les fonds pour le départ, ayant été laissé de côté par l’AFDAS (organisme qui paye les formations des gens du spectacle) qui, après m’avoir fait longtemps espérer, m’a fait dire qu’ils ne pouvaient prendre en charge un stage à l’étranger : « vous comprenez… on ne sait pas si vous suivrez bien le stage et si vous n’irez pas plutôt à la plage !  » D’une, il n’y a pas de plage à Kyôto et de deux, organiser un stage comme celui-là (je suis l’unique stagiaire et ai participé à l’élaboration du programme avec les japonais, ce qui n’a pas été simple) quand on sait ce que je fais depuis des années autour du Nô, du Théâtre Nô d’Aix-en-Provence et ce qui pourrait découler de ce voyage (pièce de théâtre sur Zeami et Kanami, Villa Kujoyama, Stages avec les acteurs japonais autour des adaptations des textes de Nô pour du théâtre contemporain), c’est tout simplement d’un mauvais goût certain que d’aller se réfugier derrière ce prétexte fallacieux.

C’est pour cette raison que j’ai lancé un SOS sur la toile : « A la recherche de 4000 euros pour apprendre le Nô », me permettant de payer les deux stages, la vie sur place et les déplacements (j’ai perdu mon statut d’intermittent le mois dernier en travaillant sur le Dom Juan et ne peux donc compter sur les assedic pour amortir ces frais)

Je ne sais pas encore ce que je ferai en échange… je cherche et suis ouvert aux idées. Ce qui est sûr, c’est que je ferai un maximum de photos, de vidéos et de prise audio + un journal écrit de ce qui sera abordé sur place. Peut-être alors un blog privé pour ceux qui ont participé ou encore un journal PDF (possiblement imprimé si tout le monde rajoute quelques euros ;-), mais nous verrons cela au retour…)

Je peux aussi, en échange d’une somme plus conséquente, venir à mon retour du Japon, assuré une conférence sur ce que j’ai appris ou sur ce voyage.

Vendre des dessins, des photos… je ne sais pas moi…

Vous avez des idées ?

En tout cas si vous souhaitez m’aider, vous le pouvez en mettant 10 euros sur mon compte paypal (si 400 personnes le font, je pourrai faire ce voyage) ou en vendant une photo, un dessin ou quoi que ce soit d’autre pour cette cause… individuelle, mais qui a su profiter à quelques personnes ces dernières années.

Merci d’avance !

Alexandre

Et voilà qu’Ozu…

Vendredi…
et pas une seconde avant ce jour pour venir vous trouver !
La fin du stage s’enchaîne avec une aventure passionnante, la création d’une bande son jouée en direct sur le film : « Histoire d’Herbes Flottantes » de Yasujiro Ozu.

Nous avons cinq jours pour finaliser cet instant de cinéma.

Avec Marc et Gilles -installés dans le salon qui devient, pendant cette courte période, un studio de création où l’on peine à circuler parmi les instruments de toute sorte : piano, saz, violon, guitare et son lot de pédales, xylophone, percussions, psaltérion, etc. Avec le lot d’amplis, les câbles qui serpentent dans cette pièce plutôt grande, au demeurant, les fenêtres calfeutrées par des couvertures et le rétro-projecteur qui souffle à nos oreilles toute la journée- nous découvrons ce film à chaque cession, un peu plus. Comme un partenaire de scène. Et quel partenaire !

C’est drôle comme le film, cet objet devient au fil des heures un être, presque vivant. Comme s’il profitait de notre attention et de notre attitude pour nous révéler des choses qu’il garde pour lui, dessous.

Les acteurs prennent du relief, les personnages de la chair et nous vibrons tous les trois en les accompagnant. Instants de vie de ces gens du voyage, de ces saltimbanques qui nous ressemblent. Si émouvants dans leur abord, si singuliers aussi. Rose s’endort sur le canapé, c’est l’histoire que son papa ne pourra pas lui raconter ce soir, parce que ce soir il est au Japon, dans les années trente et qu’il ne pourra pas revenir. On fait des pauses. On sort fumer des cigarettes, le film imprimé sur la rétine. On ne parle pas beaucoup. On écoute. Je porte Rose jusqu’à son lit… »je reviendrai bientôt mon amour… »

Et puis, c’est Jeudi. On se lève aux aurores. On défait notre studio pour l’emmener à l’Institut de l’Image d’Aix en Provence. Moi, je file retrouver Xavier, le régisseur son, au local d’Aix en Musique, pour charger avec lui le matériel qui nous permettra de retranscrire le salon dans cette salle Armand Lumel de la Méjane à Aix. On s’installe. Face à l’écran, en arc de cercle. On déplie notre matériel. Ce soir, sur cet écran vide, l’histoire de ces Herbes Flottantes se jouera une nouvelle fois.

J’ai peur. Je ne suis pas musicien. Je suis juste un homme de théâtre qui voudrait pouvoir transmettre ce que le film m’a offert pendant ces journées. Juste montrer au gens la chair de ces êtres, si sensible ! Et ne pas rater ce rendez-vous avec eux. Je pense au petit garçon, au chef de troupe, à ses femmes et son fils. Se centrer, se concentrer pour leur laisser la place de traverser les cent spectateurs qui seront là ce soir.

Il est vingt heures, nous descendons des loges. Habillés de Hakamas noirs, nous longeons les gradins pour nous mettre en place devant le film. Nous sommes les samuraï des temps modernes, prêts à mourir pour la justesse d’un geste… Nous nous installons, nos regards se croisent une dernière fois. La salle plonge dans le noir et tous les trois nous plongeons avec eux.

Je crois que nous avons réussi. La salle est muette, accrochée aux visages qu’Ozu sait si bien filmer. Et nous sommes ailleurs, avec eux, ensemble. Une parenthèse ! Un instant se suspension ! Une expérience avec tout ce que ce mot garde en lui pour ceux qui savent s’y risquer, humblement.

Aujourd’hui, c’est Vendredi. Marc et Gilles sont partis tôt ce matin. Moi, j’ai dormi. Il est 15h maintenant et je n’arrive pas à sortir de là. Je repense à ces hommes et ces femmes qui sont sur cette pellicule et avec qui j’ai fait un voyage qui restera inscrit pendant encore longtemps sur la face interne de ma rétine.

Merci à toi Yasujiro !

joli mercredi…

Jour des enfants…
J’ai donc réussi à amener les pièces nécessaires à l’obtention du passeport et à faire les différentes choses notées sur le programme.
Chercher les nouveaux tampons, déposer les pièces manquantes pour Barcarelle qui s’occupe d’éditer nos fiches de paye depuis janvier, me libérant enfin d’une charge et pas des moindres. Parallèlement, j’ai eu Sabine Putorti de l’Institut de l’Image à Aix en Provence et le projet du « ciné-concert » du 5 juin avance bien. Elle a trouvé une copie d' »Histoire d’Herbes Flottantes », la version noir et blanc et muette du film d’Ozu qui retrace la vie d’une troupe de théâtre ambulant. A priori, c’est Marc Barnaud et Gilles Geenen qui feront la musique.
C’est en cours…
Mauvaise nouvelle : La Tour d’Aigues risque de ne pas prendre « Atsumori » pour l’ouverture de son festival. Pas assez « vendeur » comme spectacle. Jean n’arrive plus à imposer sa ligne artistique. Les affaires vont mal. C’est le bureau qui devient décisionnaire… A voir quand même. Parce que s’ils veulent faire venir des grosses prod, il va falloir qu’ils payent beaucoup plus cher et qu’ils assurent une technique qui n’est pas de mise au château habituellement. Je garde donc un secret espoir.
Du côté des « sponsors », toujours rien. Personne ne semble intéressé par le sort de ce théâtre. (Je parle ici du Théâtre Nô d’Aix en Provence, le seul théâtre Nô bâti au monde hors de l’archipel du Japon !!!). Ca risque d’être encore La Maison du Japon en Méditerranée qui en assumera les frais. J’ai peur que ce soit la goutte d’eau qui fasse débroder le vase. Nous sommes déjà à 7000 euros pour « Atsumori » et il en faudra encore 5000 pour le Théâtre. Soit un budget global plus important que celui de Maître Kano qui, pour sa venue en France avec ses 20 acteurs, en reçoit 10 000.
Et en même temps, si nous ne trouvons pas cet argent rapidement, nous n’arriverons pas à construire la structure et le théâtre restera ce lieu anonyme, malgré tous les efforts fournis. J’enrage.
Bon… il faut que j’emmène Rose à son cours d’équitation. Je file !
P.S. Je mettrai en ligne des photos du projet pour le Théâtre Nô. Vous verrez, ça vaudrait vraiment le coup… un écrin pour cet outils incroyable et sans prix, cette merveille…